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patriotique, imaginé par M. Ponto pour achever de manger les économies du précédent gouvernement, a eu lieu le même jour et à la même heure par toute la France. Les élections se sont bien passées ; suivant l’usage, les anciens députés sont entrés au Sénat, — la Chambre des vétérans — et les nouveaux députés ont pris possession de leurs sièges à la Chambre.

M. Ponto, on s’en souvient, s’était présenté dans le XXXIIIe arrondissement comme candidat des intérêts masculins, contre Mme Ponto, candidate du grand parti féminin. Ainsi qu’il s’y attendait, M. Ponto a été outrageusement battu ; Mme Ponto l’a emporté de haute lutte avec onze mille voix de majorité. N’importe, M. Ponto a fait son devoir ; devant le flot envahissant des prétentions féminines, il a planté courageusement le drapeau des revendications masculines, et il s’en remet à l’avenir pour apporter le triomphe à la cause des opprimés.

Le candidat malheureux est revenu à ses chères études, à ses grands travaux financiers. Il a pris Hélène pour secrétaire. La jeune fille vient de quitter le journalisme ; nous avons déjà laissé entrevoir que le rédacteur en chef de l’Époque, M. Hector Piquefol, n’était pas tout à fait enchanté de sa collaboratrice ; à la suite d’une polémique avec un journal féminin de Marseille, mécontent de la façon un peu froide avec laquelle Hélène a parlé des hauts faits et de la prestance de la commandante des volontaires marseillaises, la rédactrice de ce urnal a envoyé ses témoins à l’Époque pour demander raison de cette froideur. Hélène ne s’est pas montrée à la hauteur de sa situation de journaliste parisienne, et, au jour et à l’heure convenus pour vider la querelle, son adversaire et les témoins l’ont vainement attendue !

Une dépêche téléphonique de Piquefol apprit à Hélèue que sa démission de collaboratrice était acceptée.

« Encore une carrière manquée », dit M. Ponto en apprenant la nouvelle ; voici une jeune personne qui me donne bien des tracas !… Allons, je vais tâcher d’en faire une financière ! »

Et M. Ponto s’efforce d’initier sa pupille aux questions de chiffres et de lui faire prendre goût aux grands problèmes économiques de l’équilibre entre la production et la consommation, de la liberté des échanges et de l’assiette définitive des budgets, toutes matières extrêmement attrayantes, et débordant d’une haute poésie pratique.

Hélène profitera-t-elle des leçons de M. Ponto ? Des aptitudes jusqu’ici latentes se développeront-elles tout à coup ? autre problème ! Pour