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les mendiants de la mort

À la porte, il se trouva face à face avec une figure semblable à celle de la glace, ou plutôt avec l’original qui jetait son image dans le cristal. Il laissa échapper un cri de surprise et il allait appeler ses gens, quand le premier mot prononcé par le sombre personnage éclaircit pour lui le mystère, et en même temps lui ôta l’envie de rendre personne témoin de la visite qu’il recevait.

— Monsieur avoir pas peur, c’est Jupiter, le bon serviteur à lui qui vient le voir.

À ces mots du nègre, Herman avait fait un mouvement de répulsion en arrière, dont Jupiter avait profité pour avancer, et celui-ci se trouvait ainsi installé dans le cabinet.

— Vous ici ! dit Rocheboise en s’adossant contre son bureau et en regardant le noir avec une violente impatience. Qui vous a permis de venir ?

— Moi demande seulement une audience à bon maître.

— Pas de mots inutiles… Parlez, que voulez-vous ?

— Dix mille francs, dit le nègre, obéissant à cet ordre d’aller droit au but.

— Vous êtes fou… Et de quel droit demandez-vous celle somme ?

— Vous savoir mieux que moi, dit Jupiter avec son rire méchant et silencieux.

— Apparemment non, puisque je le demande.

— Oh ! oh ! mauvaise raison ; monsieur de Rocheboise oublier chose dont lui veut pas se souvenir… Oh ! mauvaise raison !

— Je n’ai rien oublié, dit Herman en frémissant. À mon service, vous étiez devenu incapable de travailler, je vous ai donné de quoi vivre sans rien faire… vous voyez que je me souviens.

— Moi ai bien obéi à monsieur, moi ai vécu sans rien faire… Mais monsieur avoir pas dit a moi combien de temps il fallait vivre avec l’argent, moi ai vécu cinq ans.

— Misérable ! trois mille francs par an !

— Ah ! si bon maître aurait pas voulu que serviteur à lui vécût comme un chien.

— Peut importe ce que vous avez fait… mais maintenant, sortez, ou je vous fais jeter dehors.

— Que non… parce que Jupiter s’en irait chez le procureur du roi, et conterait à lui une histoire… une histoire véritable.