Page:Robert - Les Mendiants de Paris, 1872.djvu/177

Cette page a été validée par deux contributeurs.
173
LES MENDIANTS DE PARIS

Herman, vivement troublé par ces deux images de femme qui, pour la première fois, paraissaient ensemble devant ses yeux et représentaient pour lui deux existences opposées, ne dormit pas de la nuit. Ces agitations se continuèrent les jours suivants.

De même que les pas incertains prennent alternativement des routes divergentes, ses résolutions flottaient, son esprit se faisait des appréciations de bonheur différentes, et son âme avait à chaque instant des aspirations nouvelles et incertaines.

Mais tout cela était en vain ; le libre-arbitre d’Herman ne devait s’exercer sur aucune voie ; à partir de ce moment, sa destinée était irrévocablement fixée.


XIX

pasqual


Un matin, Herman de Rocheboise était dans son cabinet, occupé à examiner des objets de bronze placés sur une table. C’étaient une pendule et des candélabres qu’il s’était fait apporter avant d’en conclure le marché, afin de juger de l’effet que produirait cette garniture de cheminée dans la pièce où elle devait être placée.

Dans son goût pour les somptueuses futilités, il regardait les détails de cet ouvrage avec une attention sérieuse. Il avait déjà passé quelques instants absorbé par cet examen, lorsqu’en tournant la tête par hasard, il tressaillit légèrement.

Sans avoir entendu le bruit d’aucun pas, il voyait à l’entrée de sa chambre un homme grand, blond, chauve et pâle, et tout à fait étranger à sa maison.

Mais, à la même minute, il reconnut Pasqual.

Le sauveur de M. de Rocheboise avait passé à l’hôtel le temps nécessaire à la guérison de ses blessures. Valentine ayant appris l’attaque nocturne dont son mari avait failli être victime, sans savoir toutefois par quelle circonstance il s’était ainsi trouvé attardé sur le boulevard extérieur, avait donné au généreux inconnu, blessé pour la défense de M. de Rocheboise, les soins les plus affectueux et les plus constants. Herman visitait aussi Pasqual tous les jours et assistait avec joie à son rétablissement. Mais il ne l’avait vu qu’à la sombre lueur de la taverne où sous les rideaux de son lit, et en l’apercevant ainsi à