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LES CONSEILS DE MARGISTE

Berthe s’écrie en pleurs : « Retournons chez ma mère !
— À quoi bon ? dit Margiste, hé ! vous n’y pensez pas,
On saurait nous rejoindre au bout de quatre pas.
Croyez-moi, chère enfant, toute fuite est chimère ;
Mais, dût ma pauvre Alix y trouver le trépas !
J’entends que cette nuit ne vous soit point amère.

« Le ciel même a voulu, de la tête aux talons,
Qu’elle vous ressemblât de visage et d’allure,
— Hormis les pieds qu’elle a peut-être un peu moins longs ; —
Elle a mêmes yeux bleus et mêmes cheveux blonds.
Moi-même, je m’y trompe, et, si j’osais conclure,
Vous êtes le manteau dont elle est la doublure.

« S’il vous plaisait, madame, elle pourrait, ce soir,
D’un cœur triste et soumis tenter pour vous l’épreuve.
C’est elle qu’en son lit Pépin ferait asseoir.
Aux choses de l’amour, comme vous, elle est neuve,
Et, quand elle devrait, sans anneau, rester veuve,
En tel péril, c’est tout gagner qu’un peu surseoir. »