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point troublé de ce mélange d’êtres humains et de choses, il renforce au contraire l’idée, et dans son énumération, où voisinent enfants, époux, amis, compagnons, bouffons, bêtes exotiques, petits oiseaux chanteurs, petits chiens de Melita, pierres précieuses, lambris dorés, il montre que tout cela nous procure du plaisir et ne mérite point de nous attacher (1). Cependant, il y a une compassion permise aux chrétiens. Oui, reprend-il, mais une compassion qui n’est point vaine. Or, pleurer devant l’irréparable est inutile. Pleurer un mort n’est point le fait d’un chrétien. Le vrai sage et le vrai chrétien ne veulent point de ces larmes (2). Le Christ conduit à la mort défendit que l’on pleurât sur lui (3), mais il permit aux filles de Jérusalem de pleurer sur elles, car il n’y a qu’un seul mal qui soit vraiment déplorable : le mal moral. Et sur ce point capital, les rapprochements entre les deux doctrines sont faciles ; le commentateur s’y arrête. La douleur et les larmes, dit-il, sont permises devant ce vrai et seul mal le mal moral, et c’est dans ce sens que le Christ a pu dire « Bienheureux ceux qui pleurent » que Pierre a pu verser des larmes amères après avoir renié le Sauveur. Et bien que ces textes paraissent, de prime abord, contredire les premiers et qu’ils soient du ressort de la théologie plus que de la philosophie (4), Naogeorgius tient cependant à expliquer le pourquoi. C’est pour nos péchés et pour ceux des autres qu’il nous est permis de pleurer. C’est pourquoi le Christ pleura lui-même sur les ruines de Jérusalem,

(1) Op. cit. « Res partim nobis serviunt ad delectationem, ut liberi, uxor, amici, sodales, moriones, bestke peregrina, avicole canorse, catelli melitei, lapides preciosi (pp. 35-36).

(2) Ibid. « Nemo sapiens et verus christianus volet se lachrymis et luctu honorari » (p. 39).

(3) Ibid. : « Christus ad mortem ductus vetuit se defleri » (p. 41)

(4) Ibid. : « Quanquam hxc excutere et explanare ad theologiam pertinet, brevibus tamen hic ostendam cur flendum sit, aut non sit. Propter peccata nostra et aliorum simulque Dei propter ea commotam adversum nos indignationem flendum est, jussitque Dominus lugere, imo et ipse flevit super civitatem Hierusalem, Sic post negationem flevit Petrus. Et qui sic lugent atque flent beati sunt soli, non qui ob res amissas, aut hominum mortes, aliosque plorant casus. Nulla alia Christianis flendi causa est, tam propter se.quam propter alios» (pp. 41-42).