guées étude du Latin & du Grec. En effet, un Allemand qui apprend la Langue Française ne fait pour ainsi dire qu’y descendre, conduit par la Langue Latine ; mais rien ne peut nous faire remonter du Français à l’Allemand : il faut pour lui seul se créer une nouvelle mémoire ; et sa littérature, il y a un siecle, ne valoit pas un tel effort. D’ailleurs, sa prononciation gutturale[1] choqua trop l’oreille des Peuples du Midi ; et les Imprimeurs Allemands, fideles à l’écriture Gothique, rebuterent des yeux accoutumés aux caracteres Romains. On peut donc établir pour regle générale, que si l’homme du nord est appelé à l’étude des Langues méridionales, il faut des longues guerres dans l’Empire pour faire surmonter aux Peuples du midi leur répugnance pour les Langues septentrionales. Le Genre-humain est comme un fleuve qui coule du nord au midi ; rien ne peut le faire rebrousser contre sa source ; & voilà pourquoi l’universalité de la Langue Française est moins rigoureusement vraie pour l’Espagne & pour l’Italie que pour le reste de l’Europe. Il reste à savoir jusqu’à quel point la révolution qui s’opere aujourd’hui dans la Littérature des Germains influera sur la réputation de leur Langue. On peut seulement présumer que cette révolution s’est faite un
- ↑ Nous suivons en ceci le préjugé qui s’est établi sur la Langue Allemande. À dire vrai, sa prononciation est presque aussi labiale que la nôtre ; mais comme les consonnes y dominent, & qu’on la prononce avec force, on avoit cru d’abord que les Allemands parloient du gosier. Il en est de l’Allemand comme de l’Anglais, & même du Français : leur prononciation s’adoucissant de jour en jour, & leur orthographe étant inflexible, il en résulte des Langues agréables à l’oreille, mais dures à l’œil.