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MANUEL DE LA PAROLE

Comme elle je repris ma course, et jusqu’au soir
Mon pas pressa son pas ; puis je cessai d’y voir,
Immobile, implorant un seul bruit saisissable
Qui vînt à moi, flottant sur cette mer de sable.
J’écoutai, retenant mon souffle… Par moments,
On entendait au loin de sourds rugissements ;
Vers eux, comme un serpent, je me glissai dans l’ombre.
Sur mon chemin un antre ouvrait sa gueule sombre
Et dans ses profondeurs j’aperçus sans effroi
Deux yeux étincelants qui se fixaient sur moi.
Je n’avais pas besoin ni de bruit ni de trace :
Car la lionne et moi, nous étions face à face.
Ah ! ce fut un combat terrible, hasardeux,
Où l’homme et le lion rugissaient tous les deux.
Mais les rugissements de l’un d’eux s’éteignirent…
Puis du sang de l’un d’eux les sables se teignirent.
Et, quand revint le jour, il éclaira d’abord
Un enfant qui dormait auprès d’un lion mort.



ATHALIE, A. IV, SC. 3.


Joad, Joas.
Joad

Ô mon fils, de ce nom j’ose encor vous nommer,
Souffrez cette tendresse, et pardonnez aux larmes
Que m’arrachent pour vous de trop justes alarmes ;
Loin du trône nourri, de ce fatal honneur,
Hélas ! vous ignorez le charme empoisonneur ;
De l’absolu pouvoir vous ignorez l’ivresse,
Et des lâches flatteurs la voix enchanteresse
Bientôt ils vous diront que les plus saintes lois,
Maîtresses du vil peuple, obéissent aux rois ;