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MANUEL DE LA PAROLE

Aujourd’hui même encor, mon âme irrésolue
Me pressant de quitter ma puissance absolue,
De Maxime et de toi j’ai pris les seuls avis,
Et ce sont, malgré lui, les tiens que j’ai suivis,
Bien plus, ce même jour, je te donne Emilie,
Le digne objet des vœux de toute l’Italie,
Et qu’ont mise si haut mon amour et mes soins,
Qu’en te couronnant roi je t’aurais donné moins.
Tu t’en souviens, Cinna ; tant d’heur et tant de gloire
Ne peuvent pas sitôt sortir de ta mémoire ;
Mais, ce qu’on ne pourrait jamais s’imaginer,
Cinna, tu t’en souviens, et veux m’assassiner.

Cinna

Moi, Seigneur ! moi, que j’eusse une âme si traîtresse,
Qu’un si lâche dessein…

Auguste

Sieds-toi ; je n’ai pas dit Tu tiens mal ta promesse ;
Sieds-toi ; je n’ai pas dit encor ce que je veux ;
Tu te justifieras après, si tu le peux.
Écoute cependant, et tiens mieux ta parole.
Tu veux m’assassiner demain, au Capitole,
Pendant le sacrifice, et ta main pour signal
Me doit, au lieu d’encens, donner le coup fatal ;
La moitié de tes gens doit occuper la porte,
L’autre moitié te suivre et te prêter main-forte.
Ai-je de bons avis, ou de mauvais soupçons ?
De tous ces meurtriers te dirai-je les noms ?
Proeule, Glabrion, Virginian, Rutile,
Marcel, Plaute, Lénas, Pompone, Albin, Icile,
Maxime, qu’après toi j’avais le plus aimé ;
Le reste ne vaut pas l’honneur d’être nommé ;
Un tas d’hommes perdus de dettes et de crimes,
Que pressent de mes lois les ordres légitimes,