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MORCEAUX CHOISIS

Où je ne comprends rien. Il veut, bon gré, mal gré,
Ne se coucher qu’en robe et qu’en bonnet carré.
Il fit couper la tête à son coq, de colère,
Pour l’avoir éveillé plus tard qu’à l’ordinaire :
Il disait qu’un plaideur dont l’affaire allait mal
Avait graissé la patte à ce pauvre animal.
Depuis ce bel arrêt, le pauvre homme a beau faire,
Son fils ne souffre plus qu’on lui parle d’affaire,
Il nous le fait garder jour et nuit, et de près :
Autrement, serviteur, et mon homme est aux plaids.
Pour s’échapper de nous, Dieu sait s’il est allègre.
Pour moi, je ne dors plus : aussi je deviens maigre,
C’est pitié. Je m’étends et ne fais que bâiller.
Mais, veille qui voudra, voici mon oreiller.
Ma foi, pour cette nuit, il faut que je m’en donne !
Pour dormir dans la rue, on n’offense personne.
Dormons.

J. Racine.


LA CHUTE


Ils avaient adossé leur baraque au vieux mur,
Sur la place, à l’endroit d’où, quand le ciel est pur,
On découvre, de loin, les flèches de l’église.
Le vent d’hiver faisait trembler la toile grise
De l’enceinte, et parmi les rares promeneurs,
Tout autour, les enfants, curieux et rodeurs,
Se levaient sur les pieds pour rehausser leur taille,
Et par les trous cherchaient à voir, vaille que vaille.
On avait annoncé la clôture à grand bruit
De trombone, de caisse et tout ce qui séduit
La foule, et plusieurs fois promis, faveur unique,
Un spectacle nouveau, surprenant, magnifique :
Des tours sur une corde élevée à vingt pieds
De haut. Les spectateurs, avec quelques troupiers,