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MANUEL DE LA PAROLE

nous sommes étrangers à toutes vos coalitions, à toutes vos récriminations, à toutes vos luttes de cabinet, de partis ; nous n’avons été ni à Gand ni à Belgrave-Square ; nous n’avons été en pélerinage qu’au tombeau des apôtres, des pontifes et des martyrs. Nous y avons appris, avec le respect chrétien et légitime des pouvoirs établis, comment on leur résiste quand ils manquent à leurs devoirs, et comment on leur survit. Nés et élevés au sein de la liberté, des institutions représentatives et constitutionnelles, nous y avons trempé notre âme pour toujours. On nous dit : Mais la liberté n’est pas pour vous, elle est contre vous ; ce n’est pas vous qui l’avez faite. Il est vrai que la liberté n’est pas notre œuvre, mais elle est notre propriété, et qui oserait nous l’enlever ? À ceux qui nous tiennent ce langage, nous répondrons : Mais vous, avez-vous fait le soleil ? Cependant vous en jouissez. Avez-vous fait la France ? Cependant vous êtes fiers d’y vivre…

Dans cette France accoutumée à n’enfanter que des gens de cœur et d’esprit, nous seuls, nous catholiques, nous consentirions à n’être que des imbéciles et des lâches ! Nous nous reconnaîtrions à tel point abâtardis, dégénérés de nos pères, qu’il nous faille abdiquer notre raison entre les mains du rationalisme, livrer notre conscience à l’Université, notre dignité et notre liberté aux mains de ces légistes, dont la haine pour la liberté de l’Église n’est égalée que par l’ignorance profonde de ses dogmes ! Quoi ! parce que nous sommes de ceux qu’on confesse, croit-on que nous nous relevions des pieds de nos prêtres, tout disposés à tendre les mains aux menottes d’une légalité anticonstitutionnelle ? Quoi ! parce que le sentiment de la foi domine dans nos cœurs, croit-on que l’honneur et le courage y aient péri ?

Ah ! qu’on se détrompe. On vous dit : Soyez implacables. Eh bien ! soyez-le ; faites tout ce que vous voudrez et tout ce que vous pourrez : l’Église vous répond par la bouche de Tertullien et du doux Fénelon : « Nous ne sommes pas à craindre pour vous, mais nous ne vous craignons pas. »

Et moi, j’ajoute au nom des catholiques laïques comme moi, catholiques du XIXe siècle : Au milieu d’un peuple libre,