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MANUEL DE LA PAROLE

respirer ; peut-être sa voix devra-t-elle fournir une longue course, avant qu’il puisse faire une nouvelle provision d’air.

Dans le silence, la parole seule est suspendue, le geste agit encore généralement. À chaque repos elliptique, il doit se dégager une idée à travers le geste. Et même alors que le silence n’est pas elliptique, il est encore utile à la mimique, en ce qu’il permet au geste de se concevoir et de s’exécuter en partie avant la parole.

283. — La construction est la ponctuation du langage parlé, et les pauses, plus ou moins prolongées, correspondent aux points, aux points-virgules, aux virgules, etc. Aussi, tous les temps ne sont pas d’égale durée. On peut distinguer des pauses, des demi-pauses, des silences, des demi-silences, et des quarts de silence. Le silence dure d’autant plus longtemps que l’idée énoncée précédemment est plus complète par elle-même, et que sa liaison avec la suivante est moins intime. C’est affaire d’interprétation, de mesure et de discernement.

284. — Souvent le sens veut un silence à un endroit où un arrêt complet paraîtrait trop brusque et aurait pour effet de hacher le discours. On remplace alors le silence par une nuance de diction. On fait cette nuance de diction en soutenant un peu la dernière syllabe prononcée, et en abaissant ou en élevant tout à coup la voix sur le mot ou les mots qui suivent. — Ex. :

Voilà l’homme * en effet : il va du blanc au noir. (Boileau.)
Paris * est pour un riche un pays de cocagne. (Id.)

(Aux endroits où les temps ne sont pas indiqués par la ponctuation, nous marquons d’un astérisque (*) les nuances de diction, et d’un trait ( | ) les silences. Dans les exemples, nous n’indiquons pas tous les silences, mais seulement ceux qui sont nécessaires pour illustrer chaque règle.)