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EN GRAND’CHARRETTE

par exemple, et voir la Grise, docile, aller à dia, puis, en tirant à hue, la ramener à droite ! Mener, enfin !… Les jouissances comme celle-là ne sont pas drues dans la vie d’un homme. Ce qui m’étonnait, c’est que Gédéon ne parût pas tenir à conduire lui-même. Pour la descente du Coteau de Roches, il prenait les guides, c’est vrai ; mais il ne semblait pas en éprouver de plaisir, et, après le passage difficile, il me les rendait sans ombre de regret. N’était-ce pas étrange ?

Peut-être bien que, n’ayant pas à surveiller la Grise, Gédéon se trouvait plus libre pour fumer sa pipe et pour parler. Car, tout le long de la montée à travers champs, il nous contait des histoires. Parfois, il nous disait les hivers passés dans les chantiers du Saint-Maurice ; parfois, des batailles terribles, livrées on ne savait dans quel pays ni à quelle époque, mais où invariablement la grand Napoléon battait les Anglais à plates

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