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Ie feray paſſer par leur lime,
Iuſqu’aux moindres mots de mes vers.

Sa Guirlande eſt compoſée de Myrthe, de Laurier, & de Lierre, d’autant que par ces trois plantes, qu’on peut à bon droit appeller Poëtiques, ſont ſignifiées les diuerſes ſortes de Poëſie, qui fleuriſſent dans vne Academie. Mais le Myrthe particulierement, comme conſacré à l’Amour, ſert auſſi à couronner les Poëtes amoureux ; Ce qui fait dire à Nicandre, que Venus en euſt vne Guirlande, quand elle ſe treuua preſente au iugement de Paris ; & de Virgile

InMelib
Qu’à la mère d’Amour le Myrthe eſt agreable.

Quant au Laurier & au Lierre, tous les Poëtes en eſtoient indifferemment couronnez. Le Prince des Lyriques le teſmoigne par ces vers.

Hor.
Des doctes fronts le Lierre eſt le prix.

Et en vn autre endroit parlant du Laurier il en dit de meſme.

Lib. 3. Od. vlt.
Vien Melpomene, & le chef m’enuironne,
____De la Delphique couronne.

Le Lierre neantmoins me ſemble plus propre aux Poëtes Dithirambiques, ainſi appellez, à cauſe des vers qu’ils souloient chanter à l’honneur de Bacchus, Ouid. Fast.

Qui ſe plaiſt à meſler aux raiſins le lierre.

L’on peut dire pareillement que le Laurier ne conuient pas ſi bien aux autres Poëtes qu’il fait aux Epiques, qui ſe propoſent pour but de deſcrire les faits heroïques des grands Guerriers & des Empereurs, qu’on a de tout temps couronnez de branches de cét Arbre glorieux, & inuincible à la foudre. C’eſt pour cela qu’Apollon dans le premier des Metamorphoſes le deſtine pour marque d’honneur aux Conquerans, & qu’il s’en couronne luy-meſme, comme Pere des Poëtes, auſquels il fait part de ſon feu celeſte, & de cette diuine fureur dont il anime leurs penſées.

Les pommes de Grenade ſont des figures de l’vnion mutuelle qu’il y doit auoir entre les Academiciens. Car, ſelon Pierius, Lib. 54. elles ſignifient vne compagnie de pluſieurs hommes joints enſemble, & qui ſe maintiennent par leur bonne intelligence. Auſſi eſtoient-elles anciennement dediées à Iunon, à qui l’on ſouloit donner une Grenade à la main, auec l’epithete de Conseruatrice, comme il ſe void par le reuers de quelques anciennes Medailles, où l’on peut lire ces mots, Ivnu conservatrix,