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aſſez clairement d’eux-meſmes, ie diray ſeulement du dernier, que ſa mere Venus l’ayant attaché à vne colomne, au bas de laquelle ſont mis en forme de trophée ſon arc & ſes fleſches, luy donne le foüet auec vne branche de Roſier ; pour faire voir par là que la punition des Amants ne laiſſe pas d’auoir ie ne ſçay quoy de picquant & d’amer, quelque doux & agreables qu’en ſoient apparamment les ſupplices.

La ſeconde planche expoſe à nos yeux le combat d’Amour par deux Cupidons qui font à l’enuy pour s’arracher des mains vne Palme ; Sa bonne Fortune, par l’action de ce petit Dieu, auquel tend la main vne Femme auſſi aueugle que luy, tenant vne Corne d’Abondance, vn pied en l’air, & l’autre ſur vne roüe ; Sa curioſité par la Fable de Pſiché aſſez connuë ; Et ſa merueilleuſe force par vne foudre qu’il porte, qu’il ſemble auoir arrachée à Iupiter meſme, pour faire voir ſon Empire ſur ce maiſtre des Dieux.

La troiſieſme, par la Figure d’vn Amant auquel vn Vautour ronge le cœur, & par celle des trois autres qui ſont couronnez de fleurs, pompeuſement veſtus, & en action de ſe reſioüir, nous apprend, comme nous auons dit cy-deuant, que cette paſſion violente confond enſemble les plaiſirs & les ſupplices.


Favsseté d’Amovr.


ELle a pour Embléme vne Femme ſuperbement veſtuë, appuyant ſa main ſur la teſte d’vne Syrene, qui ſe regarde dans vn miroir.

Le faux Amour a cela de propre, que ſous vne belle apparence & vn langage charmant & fardé, il tient ordinairement caché ſes plus malicieuſes penſées, ou de plus monſtrueux, ou de plus difformes. Et dautant que ſes peines & ſes extremitez, comme nous auons dit autrefois, ſont les Symboles de ces meſmes penſées, ce n’eſt pas ſans ſujet que les Anciens dépeignent à ce propos la Syrene, qui par les parties d’embas eſt tout à fait monſtreuſe.

Ce faux Amour eſt encore figuré par le miroir ; car bien qu’il ſemble veritablement auoir en luy toutes les choſes qui luy ſont oppoſées, ce n’eſt pourtant qu’vne reſſemblance ſans realité, qui repreſente à gauche ce qu’on luy oppoſe à droit, teſmoignage apparent qui change la face de l’objet, comme le remarque Pierius.