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Elle eſt peinte ieune & belle, à cauſe qu’il n’eſt point d’homme quelque barbare qu’il puiſſe eſtre, qui ne ſoit attiré par la force & charmé par la douceur de ſes vers.

On la couronne de Laurier, arbre touſiours verdoyant & qui eſt à couuert de la foudre, pour monſtrer qu’elle-meſme rend les hommes immortels, & les aſſeure contre les outrages du temps, qui fait oublier toutes choſes.

Sa robbe ſemée d’Eſtoilles, eſt le Symbole de ſa Diuinité, ayant pris, comme diſent les Poëtes, ſon origine du Ciel. A quoy j’adiouſte, qu’elle eſt extremement penſiue & toute enflammée par le viſage, d’autant que les Poëtes ont pour l’ordinaire l’ame pleine de prompts mouuements, & de tranſports de fureur celeſte.

Quant à la Lyre qu’on luy met en main, c’eſt pour faire voir que les nombres de la Poëſie ont vne merueilleuſe correſondance auecque l’harmonie de la Muſique ; que ſi l’on couronne les Poëtes de Laurier, c’eſt pource que leur intention n’eſt autre que de s’acquerir de l’honneur, ayant en cela meſme objet que les plus grands Capitaines, à la gloire deſquels ils ont part, tout ainſi qu’à leurs Couronnes.


Poeme lyriqve.


SA figure eſt celle d’vne ieune Femme, qui tient de la main gauche vne Lyre, & de la droite vn archet. Son habillement eſt de pluſieurs couleurs, mais agreable à voir & aſſez eſtroit, pour monſtrer que dans vne ſeule choſe, le Poëte Lyrique en reſſerre pluſieurs autres ; comme il eſt ſignifié par ces paroles Latines, Breui complector ſingula cantu. C’eſt à dire, en peu de mots ie comprends toutes choſes.


Poeme heroiqve.


ON le peint habillé Royallement, auec vn maintien graue, vne guirlande de Laurier ſur la teſte, vn Cornet à boucquin en la main droite, & ces mots à la gauche, Non nisi grandia canto, qui ſignifient

Mon chant a pour objet les choſes les plus grandes.