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meſure des Qualitez qui peuuent eſtre deffinies, ſoit à l’eſgard de l’Ame ſeule, ou de tout le Compoſé ; D’où il faut conclurre, Que ce qui n’a point forme d’homme n’eſt pas Image, de la façon que nous l’entendons ; Et que la diſtinction en eſt tres-mauuaise, quand le corps principal ne produit en quelque ſorte le meſme effet que le Genre en la Definition.

Il eſt neceſſaire encore de bien prendre garde aux parties eſſentielles de la choſe que l’on repreſente, & d’en obſeruer ponctuellement les Diſpoſitions & les Qualitez. Par exemple, ce qu’on appelle Diſpoſition en la teſte, eſt ſa poſture diuerſe, ou haute, ou baſſe, ou en porfil, ou en plein ; Et pareillement l’air different qu’on luy donne ; ou joyeux, ou triſte, ou doux, ou ſeuere, ou enflammé d’Amour, ou glacé de Ialouſie ; & tourmenté de toutes ces autres Paſſions nuiſibles, qui ſe deſcouurent dans le viſage, dont il ſemble que la Nature ait voulu faire vn theatre. Touchant la cheuelure, les bras, les iambes, les pieds, & les autres parties du corps, il ne faut pas eſtre moins iudicieux à les bien planter, qu’à les parer des ornements les plus conuenables aux ſujets qui en font la diſtinction. Mais ſans s’arreſter par trop aux reigles qu’on en peut donner, il doit ſuffire de s’attacher aux Exemples que nous en fourniſſent abondamment les anciens Romains. Car il n’eſt pas poſſible de voir des Figures mieux diſpoſées que les leurs, & particulierement dans les Medailles de l’Empereur Adrien ; entre leſquelles il y en a deux remarquables ; dont l’vne, qui a pour inſcription le Vœu public, eſt repreſentée par vne femme à genoux, qui hauſſe les mains au Ciel ; & l’autre par vn ieune homme qui les porte aux oreilles, pour vne marque de l’Allegreſſe du peuple. I’obmetz que les diſpoſitions de toutes ces Figures ſont preſque diuerſes, & qu’on les dépeint tantoſt aſſiſes, tantoſt debout, & quelquefois en action de marcher. Quant aux qualitez par qui elles ſe remarquent, il y en a pluſieurs qui leur appartiennent ; Comme par exemple, d’eſtre blanches ou noires, ieunes, ou vieilles, & ainſi des autres choſes qui peuuent bien à peine eſtre ſeparées du vray ſujet qu’elles ont pour fondement. De maniere que de toutes ces parties iointes enſemble il ſe forme vne ſi douce harmonie, que lors qu’on vient à l’oüir, il n’eſt pas à croire combien l’eſprit eſt ſatisfait de conneſtre leur mutuelle correſpondance, & le bon iuge-