Page:Ripa - Iconologie - 1643.pdf/124

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à peu les Elemens, & conſume toutes les choſes materielles. Surquoy ie concluds à la loüange de l’Harmonie, Qu’il s’eſt trouué des Gentils qui ont creu, que les Dieux meſmes en eſtoient compoſez, & pareillement de nombres, comme nous le ſommes d’ame & de corps ; Si bien concluoient-ils, qu’à cauſe de cela ils eſcoutoient volontiers la Muſique, & ſe laiſſoient fléchir bien ſouuent à la douceur de ſes accords rauiſſans.


Histoire. LXXVI.


SA figure reſſemble à peu prés à celle d’vn Ange, à cauſe des grandes aiſles qui ſont attachées à ſes eſpaules. Et bien qu’elle regarde derriere, elle ne laiſſe pas toutefois d’eſcrire ſur vn grand Liure, que Saturne ſouſtient ; & s’appuye du pied gauche ſur vne pierre carrée.

L’Hiſtoire, qui fait profeſſion d’eſcrire auec ordre ce qui ſe paſſe dans le monde, eſt peinte auecque des aiſles, pour monſtrer qu’elle va publiant de toutes parts les diuers euenemens, auec vne incroyable viteſſe.

Elle tourne pour cét effet les yeux en arriere, à cauſe qu’elle trauaille pour la poſterité, par la deſcription qu’elle fait des choſes paſſées, afin d’en perpetuer le ſouuenir. Car, comme dit Petrarque, Sonet 84.

Elle dompte les ans ; & ſes eſcrits ſont tels,
Que par eux elle rend les hommes immortels.

C’eſt pour cela qu’elle s’appuye ſur les eſpaules de Saturne, pource qu’elle rend vn iuſte teſmoignage du Temps, dont elle eſt victorieuſe : En vn mot, c’eſt la maiſtreſſe de la vie, la lumiere de la memoire, l’eſprit des actions, & le ſouſtien de la verité ; Car elle ne ſe doit iamais laiſſer corrompre par le menſonge, ny par ſes intereſts propres ; mais dire purement ce qui eſt, ſans apporter aucun fard à cette ſyncerité naïue, dont ſa robe blanche eſt le ſymbole.


Hospitalité. LXXVII.


CEtte Dame, dont l’aage eſt mediocre, le viſage riant, & la beauté ſinguliere, ſemble vouloir accueillir quelqu’vn à bras ouuerts. Elle eſt veſtuë de blanc, & tient de la main droite vne Corne d’abondance, d’où tombent peſle-