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LES FEMMES POÈTES BRETONNES

Épargnent la cime touffue.
À l’heure où le soleil, enflammant l’horizon,
S’enfuit rayonnant d’or et couronné d’opale,
C’est là qu’en ses loisirs la beauté virginale
Se plaisait à fouler les sentiers de gazon.
Au bord de l’Achéron, telles qu’on peint les ombres,
De leurs jours écoulés gardant les souvenirs,
Des vestales, errant sous les feuillages sombres,
L’environnaient de pénitents soupirs.
Du zéphyr cependant l’haleine fraîche et pure
Lui portait en tribut les parfums d’alentour,
Et mille oiseaux, peuplant les dômes de verdure,
Animaient ces beaux lieux par leurs doux chants d’amour.
Sans doute… et qui défend d’une loi trop cruelle ?
Où les pâles soucis n’ont-ils point pénétré ?
Sans doute plus d’un cœur, à sa peine fidèle,
De ce calme touchant fut en vain entouré.
Je t’en veux attester, noble et tendre Lucie,
Ô toi dont la jeunesse enlevée aux plaisirs
D’un voile de douleur se montrait obscurcie,
Toi dont un vœu précoce enchaîna les désirs :
D’un soin consolateur tu fuyais la tendresse ;
La pompe de ces jours chéris
Où le cloître égayé se pare d’allégresse
Ne pouvait de ton front écarter la tristesse,
Ne pouvait dans tes yeux faire éclore un souris.
Mais, épargnant ta peine à la foule indiscrète,