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LES FEMMES POÈTES BRETONNES

Alors que m’adressant un regard long et tendre,
Les auteurs de ma vie entrèrent au tombeau,
Alors qu’en hommage à leur cendre
Un cyprès s’éleva non loin de mon berceau,
Voici les lieux où l’amitié craintive
Courut me déposer au matin de mes ans,
Ainsi que la plante hâtive
Que l’on veut dérober au souffle des autans.
Dans ces lieux chéris, la nature,
À mes jeunes regards déployant sa splendeur,
M’offrit des cieux, des eaux, une verdure,
Brillant plus qu’aujourd’hui de pompe et de fraîcheur.
Ici, de l’innocence épuisant tous les charmes,
J’errais sans trouble, ignorant si mes jours
Seraient de biens divers embellis dans leur cours
Ou seraient parsemés d’alarmes.
Mais le germe secret des plaisirs, des douleurs,
Mais un instinct du cœur, un présage peut-être,
Me faisait rechercher l’abri le plus champêtre,
Et mes yeux s’étonnaient de répandre des pleurs.
Souvent aussi, souvent, de mes vives compagnes
J’excitais les folâtres jeux ;
Nos accents confus et joyeux
Se prolongeaient dans les campagnes.
Écho ! rends-moi ces sons exhalés sans retour.
Que dis-je ? tout est mort dans cette enceinte immense,
Et l’écho se tait à son tour.