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MADAME DESROCHES

Ainsi montait aux cieux le cri de la détresse,
Entre la mâle audace et les tendres vertus,
Entre la force et la faiblesse.
Ces rapports touchants ne sont plus !
Seule, osons pénétrer dans cette route ombreuse,
Où l’amitié garda tant de cœurs empressés,
Où l’amour, égarant sa tristesse rêveuse,
Laissa ses doux chiffres tracés.
Par les mêmes sentiers que l’arbuste sauvage
Déshonore aujourd’hui de ses jets épineux,
J’arrive à ce portique où le ciseau pieux
Des arts sut agrandir l’ouvrage.
Séjour antique et révéré,
Dont l’œil ne perçoit point les innocents mystères,
L’impie à sa rage livré
A détruit tes remparts austères ;
Il a foulé ton sol sacré ;
D’avides possesseurs par une indigne atteinte
Hâtèrent à l’envi les outrages du temps :
Un lustre a sur ces monuments
Des siècles apposé l’empreinte.

Mais quel attrait nouveau, quel sentiment vainqueur
Fait couler en mon sein mille douceurs secrètes ?
Pouvoir des souvenirs, ô prestige enchanteur !
J’ai respiré l’air pur qui règne en ces retraites,
Et de mes premiers ans j’ai ressaisi la fleur !