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SYLVANE (MADAME LEBORGNE)

Joie ou pleurs, quand la mort réclame
Ce corps, qui de droit lui revient,
Joie ou pleurs : tout cela n’est rien.

Brûle donc, immortelle flamme !
Joie ou pleurs, qu’importe, ô mon âme ?…
Le Dieu qui t’aime le sait bien.

UN SOIR À CASTELLIN

Rives de Castellin, combien vous étiez belles,
À cette heure paisible où, dans l’ombre du soir,
Vous dérobiez soudain les splendides dentelles
De vos bois endormis, qui, sur l’horizon noir,
Découpaient leur profil, et regardaient, sans nombre,
Leurs fantômes géants courir parmi l’eau sombre !

Encadré par les joncs, j’aimais, ô Castellin,
Ce beau miroir perdu dans une vasque immense ;
J’aimais ta solitude et le profond silence
Que troublait seulement l’écluse du moulin.

Et quand dans le ciel bleu paraissaient les étoiles,
Comme leurs clairs rayons poétisaient la nuit !
Comme alors sur les prés, du brouillard qui s’enfuit
On voyait se tisser au loin les fines toiles…
C’était bien l’heure sainte, où le monde, envahi