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MADAME SOPHIE HUE

Son chat sur ses genoux, confiante, vermeille,
Aurore, frais printemps, vie en sève, elle dort ;
Et le peintre cruel, pendant qu’elle sommeille,
À posé devant elle une tête de mort !

Les lugubres débris qui furent un visage,
Des lèvres et des yeux pleins de charmes vainqueurs,
Semblent lui parler bas, haineux jetons, sans âge,
Sans prunelles, sans voix, sinistrement moqueurs.

C’est un très vieux portrait d’une très jeune fille :
Fronton rubanné d’or et biseaux de cristal,
Plus triste à regarder dans son cadre qui brille
Que sous de pâles fleurs un cercueil virginal.

Celle qu’on couche là peut-être eut sa chimère,
Et, cœur en deuil, au moins de souffrir a cessé ;
Celle qui dort ici, qu’attend la vie amère,
N’avait pas encor commencé.