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Et puis, sentant venir le découragement,
Demeurer immobile, et les yeux dans le vide…
Parfois on aurait dit que sur ce front livide
Un nuage passait… la femme sanglotait ;
C’était le souvenir au flot noir qui montait !
« Mon enfant, de ta tombe ils ont fermé les portes ;
Vainement je voudrais rentrer dans le passé.
Tes cheveux adorés tombant en boucles mortes,
Voilà de mon bonheur tout ce qu’ils m’ont laissé.
Où donc vont les enfants quand ils quittent la terre ?
Pourquoi nevient-on pas au moins dire à leur mère
Ce qu’ils sont devenus ? — Seigneur, qu’avez-vous fait ?
Aviez-vous à venger quelque immense forfait ?
— Je porte mon fils mort depuis ses funérailles,
Comme je l’ai porté vivant dans mes entrailles.
Ne venez rien chercher où vous avez tout pris,
Car de moi maintenant vous n’êtes plus compris.
Avec mes jours heureux, ma foi, mon âme est morte.
Le jour, la nuit, le bien, le mal, rien ne m’importe ;
La mort et ses dangers pour moi n’ont plus d’horreur,
Depuis qu’il n’est plus là, je n’ai jamais eu peur !
Vous ne pensiez donc pas aux malheureuses mères
Quand vous avez laissé le doute et les mystères
Errer sur les tombeaux ? Dites-moi seulement
Si vous avez mon fils ! — Dans cet affreux moment
Où je perdais l’espoir, du fond des noirs abîmes
J’appelais… vous fuyiez, et de cimes en cimes.