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Vois ce beau jour, si beau pour toi, pour moi cruel,
Il eût sanctionné notre amour mutuel.
Si tu m’avais aimée, Eudore, ce qu’il jette
De trésors sous tes pieds eût couronné ma tête,
Et pour la fiancée et pour le fiancé
Le sentier du bonheur était sûr et tracé ;
Nous en eussions gravi la pente transcendante
Avec ravissement, avec la joie ardente
De deux aigles qui vont cacher dans le soleil
Les splendeurs d’un hymen céleste et sans pareil.

« Si tu m’avais aimée, Eudore, ajouta-t-elle,
Comme pour nous la vie était douce, était belle !…
Quelle douceur !… toujours ensemble !… pour nos yeux
Quel charme !… Voir la terre et vivre dans les cieux !… »
Velléda s’arrêta sur la cime rocheuse
De la montagne. À l’est, la côte lumineuse
Pâlissait sous les feux pâlissants du zénith ;
Les oiseaux du grand jour s’approchaient de leur nid ;
Le vent chaud tiédissait ; une fraîcheur exquise
Et suave tombait du souffle de la brise ;
Le calme se faisait partout : dans les buissons,
Moins de bruissements, dans l’air moins de chansons,
Plus d’haleine et, pourtant, moins d’ailes palpitantes ;
Dans la fleur, bientôt moins de teintes éclatantes ;
C’était le jour encor, mais calmé, mais serein,
Comme un prince abdiquant le pouvoir souverain,