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LES FEMMES POÈTES BRETONNES

Sa main de plomb s’étend sur un front inspiré,
Mais elle pèse en vain sur sa tête indigente :
Il chante, souffre, meurt, et son ombre géante
Reçoit de l’avenir des siècles pour instants.
Le passé dans son gouffre abîme en vain les âges :
Sur une mer de gloire, aux ondes sans rivages,
Homère est là, debout, en monarque du temps.

De sa grande raison laissant briller la flamme,
Socrate sur tes dieux lève les yeux de l’âme ;
Et lui seul ose voir la suprême clarté.
Bientôt, calme à leur bruit quand se heurtent ses chaînes,
Quand le poison bouillonne et dévore ses veines,
Il meurt, en méditant son immortalité.

À ce qui vient des cieux l’ignorance et l’envie
Ont-elles jamais pardonné ?
Le Tasse et Camoëns n’ont-ils pas bu la vie
Comme un nectar empoisonné ?
Ce monde, qui semblait rougir de les comprendre,
A pourtant eu des pleurs pour en mouiller leur cendre
Mais c’est sur leur tombeau que l’on s’est prosterné.

Toi qui, vers de jeunes rivages
Guidant de l’Espagnol les incertains vaisseaux,
Des astres du midi sur de nouvelles plages
As vu briller les feux nouveaux,
Colomb, de pas hardis tu sus empreindre l’onde :