Page:Rinn - Un mystérieux enlèvement, 1910.djvu/246

Cette page n’a pas encore été corrigée

jactance et fut rayé des cadres de l’armée. Vainement, durant un demi-siècle, il s’insurgea contre l’arrêt qui l’avait frappé[1] ; vainement, à chaque changement de régime ou de règne, il demanda qu’on lui rendît son grade et son épée. Il mourut en 1860, sans avoir obtenu sa réintégration dans cette même armée qui accueillait ceux dont la coopération à la délivrance du Sénateur avait, en fin de compte, mené de Canchy et de Mauduison à l’échafaud ; dans cette armée qui chargeait de grades et d’honneurs les Carlos Sourdat[2] et les Bourmont.

Ce dernier n’avait pas appris, sans frémir, les insinuations dirigées contre lui par le Commissaire du Gouvernement[3], et la conduite déshonorante du Ministre, qui les avait couvertes de son silence. Sa protestation pour être tardive[4], n’en fut pas moins vive : « Dans quelle vue, s’écriait-il, aurais-je fait enlever le Sénateur ? Est-ce comme ennemi personnel ? Je n’en avais entendu parler de ma vie. Est-ce comme ennemi de parti ? Je le crois un des moins dangereux qui existent, et la façon dont j’ai traité ceux que les chances de la guerre avaient mis en mon pouvoir prouve que je suis, par caractère et par principe, très ennemi de violences semblables. Serait-ce enfin pour avoir de l’argent ? pour tourmenter un acquéreur de biens nationaux ? Les acquéreurs de mes propres biens ont été sans cesse à ma disposition ; je pouvais les rançonner, je pouvais même les tuer impunément. Je n’en ai rien fait... »

  1. Voir l’étude déjà citée de M. Lenôtre.
  2. Voir page 86, note 1.
  3. Voir page 217.
  4. En août 1803. Voir page 121.