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Portalis, les Monge, les Séguier, les Lally-Tollendal, les Rohan-Chabot (nous citons entre mille), recherchèrent son commerce et pratiquèrent son amitié. Évidemment il y a maldonne.

Il a eu de regrettables faiblesses ? Est-ce une raison pour lui faire tort de ses qualités ? Nous écrivions de lui naguère[1] : « Nature complexe, humaine et bonne par tempérament, prudente par instinct sinon par calcul, prompte à subir l’influence du milieu ; capable, par raison politique, d’approuver des mesures propres à créer des victimes, et portée, par sensibilité d’âme, à soustraire ces victimes à la rigueur de ces mesures. » Ajoutons, – sans quoi l’on aurait beau jeu à tirer de là argument contre nous, – fidèle à tenir tout engagement pris par lui ou pour lui, et il ne sera pas une de ces paroles qui ne lui convienne en cette aventure, dont on a trop volontiers oublié qu’il fut la première et l’innocente victime.

Il y a eu déformation de l’Histoire, datant du lendemain même de l’affaire, et qui a réagi sur tous les écrits ultérieurs. Le côté romanesque et mystérieux de l’événement ; l’âge, la qualité, la présomption d’innocence des condamnés, les faux-fuyants du Sénateur, ont engendré maints commentaires, maintes hypothèses, maints on-dit, et, l’imagination grandissant, compliquant, altérant les faits, peu à peu la Légende côtoya l’Histoire, inspira le Roman, et, du Roman, repénétra l’Histoire, par une suggestion dont il est intéressant de reconstituer la genèse et de suivre le progrès.


II

  1. Revue des Deux-Mondes. ─ 1er novembre 1907.