C’était ce nom seul, ces trois syllabes qui, tel un éclatement dans les profondeurs, avait ramené à la surface les débris du passé ; d’un passé qui à sa conscience retrouvée apparaissait tristement miteux. Les autres, eux, auraient pu évoquer leurs vacances enfantines à La Malbaie, à Old Orchard et pour madame LeMay, dans les jardins immenses et somptueux de la Résidence, à Spencer Wood. Tandis que pour elle, ce n’était que la rue Mentana.
— La rue… quoi, Robert ? La rue… Matana ?… La rue… Montagna ?
C’est avec une joie intérieure féroce et une fausse nonchalance qu’elle déchire et déforme à plaisir ce nom que pourtant elle ne connaît que trop.
« … Dans le monde ! Où est-ce que ça perche, cette rue-là ? À Viauville ? Dans la Côte-Saint-Michel ? »
Mais heureusement le docteur vient de se lever. Son départ détourne l’attention.