rouge, les lèvres lui paraissaient pâles ; ses cheveux étaient sans art et ses jambes portaient bas de coton.
— Qui est-ce que vous êtes donc, vous ?
— Ben, je vous l’ai dit : la Poune.
— La Poune qui ?
Elle le regarda surprise à son tour. Eh quoi ? cela ne suffisait donc pas ?
— Je reste chez les Vaillancourt, le troisième voisin, là-bas, la maison verte.
— Alors Vaillancourt, c’est votre…
— Non ! c’est rien. Ils m’ont pris quand j’étais petite.
— Vos parents, d’où est-ce qu’ils étaient ?
— Mes parents ?…
Ses épaules eurent un mouvement étonné. Il y a si longtemps qu’on ne lui avait posé pareille question.
— Chez les Vaillancourt, c’est mon chez nous. Moi je suis une Saint-Ange, Marie Saint-Ange. Mais on m’appelle jamais de même… La Poune.
— Bon, ben, écoutez, Marie, si vous voulez faire pour moi comme pour le vieux, je vous les donnerai vos deux piastres par mois. Peut-être plus. Vous avez pas l’air malcommode. Vous connaissez l’ouvrage…
— Ben sûr…
— Et pi, p’tête ben que vous connaissez le tabac !…
Il ne pouvait s’empêcher d’être égrillard.
Mais elle répondit, sérieuse :
— Ben sûr que j’connais le tabac ; partout ici c’est du tabac qu’on fait. J’aide toujours, surtout pour planter.
Évidemment, elle n’avait pas compris. Après tout, se dit-il, ce n’est qu’une fille de campagne !
Il n’était pas installé depuis une semaine qu’il reçut la visite d’un placier en machines agricoles. C’était un