Page:Rignano, La question de l’héritage, 1905.djvu/47

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tament, mais non celui d’en enrichir une seule personne, au-delà d’un maximum assez élevé d’ailleurs pour assurer une confortable indépendance. Les inégalités de fortune provenant de l’inégalité des efforts, de la frugalité, de la persévérance, des talents et, jusqu’à un certain point, des chances favorables, sont inséparables du principe de la propriété privée, et on ne peut accepter celui-ci sans en admettre les conséquences ; mais je ne vois rien d’opposable à la fixation d’une limite au montant de ce qu’on peut acquérir grâce à la bienveillance d’un autre, sans qu’on ait eu lieu d’exercer aucune faculté »[1].

Une objection se présente d’abord : ce projet annulerait à un moment donné le stimulant à épargner, et un père de famille cesserait de travailler dès qu’il aurait accumulé le maximum de l’avoir transmissible aux siens par héritage. Il pèche d’ailleurs surtout à notre point de vue parce que, pour ne pas léser, en apparence du moins, le droit de tester, il accorde au testateur la faculté de disposer à son gré de la partie de son bien que la loi lui défendrait de transmettre à ses enfants[2]. Cette partie n’irait certainement pas à l’État. Le plus souvent elle passe-

  1. J. Stuart Mill. Principles of political economy (Longmans, Green et Cie, London, 1900), deuxième ch. du livre II. page 139. Wallace, Bad Times (Macmillan, London, 1885) fait une proposition analogue (p. 88).
  2. En réalité le droit de tester ne serait pas entièrement respecté ; il serait même considérablement amoindri par la limitation du montant des richesses transmissibles aux êtres les plus aimés. Cette limitation, qui ne donne lieu à aucune