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à laquelle elle est infiniment moins apte que ceux qui y ont été prédisposés tout naturellement par la sélection darwinienne. Mais, une fois adultes, les fils n’ont plus besoin de l’aide spéciale des parents. De sorte qu’en tout cas il suffirait, si le père mourait prématurément d’accorder à ses fils en bas âge, et jusqu’à leur majorité, le simple usufruit de la fortune paternelle ou d’une partie de cette fortune.

Les choses sont loin de se passer ainsi aujourd’hui. Non seulement les enfants demeurent propriétaires, et pour toute leur vie, des biens que leur père a accumulés (ce qui serait déjà, en soi, contraire à une justice uniquement fondée sur la loi biologique), mais ils peuvent ajouter à cette fortune celle de tous leurs ascendants. Et il n’existe, en vérité, aucune loi biologique qui justifie le droit d’être assisté par les plus lointains ancêtres.

Mais, en outre, la possibilité accordée à quelques-uns de protéger leurs enfants bien au delà du temps ou des bornes indiqués par les lois naturelles n’a-t-elle pas pour conséquence nécessaire l’insuffisance de l’aide reçue par la grande majorité des enfants des pauvres ? Ne voit-on pas la mortalité sévir parmi ceux-ci bien plus que chez les autres ? Il paraîtrait donc juste, si la justice se fondait véritablement sur la biologie, d’enlever aux riches la faculté d’un surcroît d’assistance inutile et contraire à la loi naturelle, pour accorder d’autre part aux prolétaires la possibilité d’aider leurs enfants dans la mesure que cette loi impose.