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leur suffisent souvent ; ou si quelquefois ils ont besoin, par exemple, de bibliothèques et de musées publics, de laboratoires scientifiques, de galeries publiques d’œuvres d’art et d’expositions artistiques, ou même, encore, de représentations théâtrales, de concerts grandioses, ou autres semblables choses, ils ont besoin par là, en effet, de produits du travail de l’homme, lesquels produits ont demandé ou demandent pour leur production une forte dépense de forces et d’intelligence ; mais comme ces produits sont tels qu’ils peuvent servir à la jouissance d’une foule de personnes en même temps ou successivement, la somme de travail qu’ils ont coûté, rapportée à tous ceux qui en jouissent, vient à être bien petite pour chacun d’eux. Pour le richissime blasé, au contraire, des centaines de travailleurs travaillent qui se donnent de la peine exclusivement pour lui, et son bonheur n’est pour cela nullement augmenté ; des centaines d’êtres humains s’acharnent et se donnent de la peine pour porter de l’eau à la mer, dont le niveau cependant ne s’élève pas même d’une quantité infinitésimale.

Ainsi, pour toutes ces catégories de satisfactions de besoins factices ou infinitésimaux, à la douleur ou à la peine d’une quantité donnée de travail, qui est égale quelle que soit l’intensité des besoins que ce travail sert à satisfaire, on n’a à opposer aucune augmentation sensible de la quantité totale de félicité humaine. Une répartition plus égale des richesses ne supprimerait que cette félicité minime ou même nulle, et elle