Page:Rignano, La question de l’héritage, 1905.djvu/107

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 105 —

du poids des intérêts à servir a des capitaux éminemment improductifs, le profit du capital productif demeuré aux mains des particuliers ou qui s’y accumulerait encore à mesure s’élèverait proportionnellement, toutes choses égales d’ailleurs : l’importance pour le capital privé des emplois socialement avantageux en serait donc considérablement accrue.

2o Grâce au rétrécissement, à la disparition graduelle d’un des plus vastes champs d’action de la spéculation malsaine, on en verrait peu à peu disparaître les tristes effets, et entre autres la redistribution artificielle concentratrice et inique de la richesse sociale[1].

3o L’abolition des rentes sur l’État éliminerait un autre des multiples et multiformes parasitismes sociaux : car s’il est utile, et par conséquent équitable, de servir les intérêts de la

  1. Vers la fin de l’année 1881, on estimait à 3 milliards le capital disponible à la Bourse de Paris en sommes destinées aux reports, ou données aux intermédiaires comme couverture, ou tenues en réserve par les joueurs, ou engagées dans les spéculations. Les affaires traitées dans cette Bourse par les agents de change représentaient en 1855 une somme de 65 milliards. Elles en représentent plus de 110 aujourd’hui, et encore faut-il ajouter à ce chiffre les 77 milliards maniés par les coulissiers. Quant à la nature de ces affaires, on calculait il y a quelques années qu’il y en avait une de réelle sur 16 ou 18. Plus récemment, à Londres, on a calculé que sur 20, 19 sont de simples jeux de bourse (Camillo Supino La Borsa e il capitale improduttivo, Milano, Hoepli, 1898, 92 et. 173).
    On peut évaluer la détraction subie de ce chef par le profit du capital productif quand on songe que, dans le monde de la Banque et de la Bourse, un capital qui ne rend pas 20 ou 25 0/0 est considéré comme pauvrement employé(Loria, Analisi della propr. capit., I, 560).