Page:Riemann - Œuvres mathématiques, trad Laugel, 1898.djvu/332

Cette page a été validée par deux contributeurs.
296
DEUXIÈME PARTIE. — MÉMOIRES PUBLIÉS APRÈS LA MORT DE RIEMANN.


initiales situées dans un élément superficiel, on obtiendrait une surface illimitée de mesure de courbure constante, c’est-à-dire une surface qui, dans une variété plane de trois dimensions, prendrait la forme d’une surface sphérique, et qui serait par conséquent finie.


§ III.


Les questions sur l’immensurablement grand sont des questions inutiles pour l’explication de la nature. Mais il en est autrement des questions sur l’immensurablement petit. C’est sur l’exactitude avec laquelle nous suivons les phénomènes dans l’infiniment petit, que repose essentiellement notre connaissance de leurs rapports de causalité. Les progrès des derniers siècles dans la connaissance de la nature mécanique dépendent presque seulement de l’exactitude de la construction, qui est devenue possible, grâce à l’invention de l’analyse de l’infini, et aux principes simples découverts par Archimède, par Galilée et par Newton, et dont se sert la Physique moderne. Mais dans les Sciences naturelles, où les principes simples manquent encore pour de telles constructions, on cherche à reconnaître le rapport de causalité en suivant les phénomènes dans l’étendue très petite, aussi loin que le permet le microscope. Les questions sur les rapports métriques de l’espace dans l’immensurablement petit ne sont donc pas des questions superflues.

Si l’on suppose que les corps existent indépendamment du lieu, la mesure de courbure est partout constante, et il résulte alors des mesures astronomiques qu’elle ne peut être différente de zéro ; dans tous les cas, il faudrait que sa valeur réciproque fut une grandeur en présence de laquelle la portée de nos télescopes serait comme nulle. Mais si cette indépendance entre les corps et le lieu n’existe pas, alors, des rapports métriques reconnus dans le grand, on ne peut rien conclure pour ceux de l’infiniment petit ; alors la mesure de courbure de chaque point peut avoir suivant trois directions une valeur arbitraire, pourvu que la courbure totale de toute portion mesurable de l’espace ne diffère pas sensiblement de zéro ; il peut s’introduire des rapports encore