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Chine. Cette vieille civilisation, découverte tout à coup, semble avoir frappé les Anglais d’étonnement. Aussi se conduisirent-ils avec modération. Le commodore (vice-amiral) sir Gordon Bremer et le capitaine Charles Elliot surintendant du commerce britannique en Chine, puis l’amiral Georges Elliot, employèrent les voies conciliatrices, et essayèrent de négocier. Ce fut une série interminable d’entrevues, un échange continuel de chops (lettres, papiers publics, dépêches officielles). Le gouvernement chinois, fidèle à sa politique, ne faisait que parlementer et ne terminait rien. Enfin, au mois d’août 1840, l’amiral Elliot s’avança avec ses vaisseaux de feu (les Chinois désignent ainsi les vaisseaux à vapeur) vers le golfe de Pe-tche-li, à l’embouchure de la rivière de Pékin. Le mandarin Kea-shen, vice-roi de la province et le membre le plus influent du ministère chinois, effrayé de l’audace des barbares, demanda une entrevue aux plénipotentiaires anglais, en qualité de commissaire impérial. Voici le récit fort curieux qu’en fait lord Jocelyn :

« À deux milles de la ville de Tas-kou, nous vîmes venir au devant nous une jonque (barque) de mandarin, à bord de laquelle se trouvaient deux personnages de haut rang : l’un, qui portait un bouton rouge à son bonnet, était le général des gardes du corps tartares de l’Empereur ; l’autre occupait le même grade dans la maison particulière de Kea-shen ; il avait un bouton bleu sur son bonnet[1]. Ils étaient envoyés au-devant de nous par le commissaire im-

  1. Nous expliquerons plus loin les attributions de ces hauts dignitaires, nommés mandarins. Leur costume est fort riche ; il se compose d’un surtout ou spencer, bordé de fourrures précieuses, d’une longue tunique de soie brodée, de larges pantalons et de bottes également en soie. Il y a neuf rangs de mandarins, distingués chacun par la couleur du bouton qu’ils portent sur leur bonnet. Chaque rang à son tour se divise en première et en seconde classe ; mais toutes les deux ont les mêmes insignes. Les mandarins de l’ordre civil ont la préséance sur les militaires. Les couleurs affectées aux divers rangs sont comme suit : Premier rang : bouton rouge, donné seulement aux nobles des familles les plus distinguées. Deuxième rang : une pierre rouge mar-