les désincarnés sur leur situation actuelle, matérielle ou psychologique, ne m’inspirent qu’une confiance très limitée, car il faudrait d’abord prouver qu’il y a des désincarnés. Je ne partage point la robuste foi d’un des correspondants de M. Conan Doyle, M. Hubert Wales, qui, victime d’un anthropomorphisme naïf, écrit[1] : « Les esprits ont des corps, aussi tangibles pour eux que les nôtres le sont pour nous ; ils n’ont pas d’âge : ils ne souffrent pas ; il n’y a ni riches, ni pauvres ; ils portent des vêtements et prennent des aliments ; ils ne dorment pas. Les Esprits, de pensées, de goûts et de sentiments similaires, gravitent ensemble ; les époux ne sont pas forcément réunis. »
Je ne puis, hélas ! être pénétré de la même conviction que mon généreux ami W. Stead, qui, lorsque je vins le voir après qu’il eut perdu son fils, me dit : « Pourquoi voulez-vous que je sois triste ? Je lui ai écrit ce matin, et il va me répondre ce soir. Il est très heureux, et nous sommes en relation quotidienne, comme jadis. »
A mon humble avis, par la métapsychique subjective la preuve de la survivance n’a pas été donnée, mais je m’empresse d’ajouter qu’on s’en est approché très fort. Si une preuve pouvait être fournie de la survivance de la conscience, cette preuve eût été donnée.
Mais peut-elle être donnée ? Je ne vois pas, en vérité, comment on pourrait trouver des arguments meilleurs que les cas de Georges Pelham ou de Raymond Lodge, et vainement je m’efforce d’imaginer des expériences plus décisives, des observations plus probantes.
A vrai dire — car il faut être aussi réservé dans les négations que dans les affirmations — certaines apparences sont là pour nous faire croire fortement à la survivance des personnalités disparues. Pourquoi les médiums, même lorsqu’ils n’ont pas lu les livres spirites, et qu’ils ne sont pas initiés aux doctrines spirites, vont-ils immédiatement personnifier tel ou tel mort ? Pourquoi la personnalité nouvelle s’affirme-t-elle avec tant de persistance, tant d’énergie, et même parfois tant de véracité ? Pourquoi se sépare-t-elle si nettement de la personnalité du médium ? Toutes les paroles des grands médiums sont imprégnées, pour ainsi dire, de la théorie d’une survivance. Apparences peut-être, mais pourquoi ces apparences ?
- ↑ Conan Doyle, loc. cit., 152.