MUNITIONS 351
fugitive, avait été qu'on venait me demander un secours médical quelconque. Mais il n'y eut plus rien. J'ouvris la porte (mais de celajene suis pas absolument sûr), et, ne voyantpersonne, j'inscrivis sur un bout de papier l'heure exacte, 1 heure 20 (car je m'étais, depuis quelques secondes, rendu compte qu'il s'agissait d'une hallu- cination). Je n'étais cependant nullement effrayé, et je pus sans peine, au bout d'une demi-heure environ, me rendormir.
Pourtant mes cinq fils étaient en ce moment à la bataille, exposés aux pires périls. Mais, comme il y avait une voix de femme, et que, ces jours-là, ma belle-fille devait accoucher, je me suis imaginé que c'était la monitiou de cet accouchement. Même j'inscrivis là précise prévision de cet événement sur mon carnet.
Ce n'était pas cette monition-là. On ne peut même pas parler dune autre monition quelconque. Six jours auparavant, sans que la nouvelle me fût encore parvenue, le 17 septembre, à Reims, dans l'après-midi, mon fils Jacques avait été sérieusement blessé, et fait prisonnier.
De par cette expérience personnelle, je peux donc me rendre compte du caractère d'une monition auditive. (Qu'elle soit lucide, ou non, peu importe au point de vue du caractère psychologique qu'elle revêt.) Si je puis en juger par mon cas, c'est aussi net qu'un phénomène de la vie normale. Au début, quand je m'éveillai, et que j'étais dans le Borderland, il y eut un peu d'incertitude ; mais en quelques secondes l'extériorisation se précisa. Et même il est remarquable que tous les détails s'en soient fixés solidement dans ma mémoire. Ils se déforment quelque peu sans doute, mais la trame reste solide.
Pour ce qui est de cette monition personnelle, il est absolument impossible de prouver qu'il s'agit là d'une monition relative à la blessure et à la captivité de mon fils Jacques. Pourtant je demeure convaincu — sans d'ailleurs demander que cette conviction soit partagée — qu'il s'agit là d'une monition véritable. L'analogie est trop grande avec les innombrables cas observés.
C'est la seule monition hallucinatoire que j'aie reçue.
Cependant, j'ai eu deux fois, dans le cours de ma vie, si longue déjà, deux éclairs de cryptesthésie, un dans la veille, un autre dans l'état de rêve.
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