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UNE HISTOIRE DE L’AUTRE MONDE

XV

NOCES DE SANG DANS UN TOMBEAU

Jean et Jeanne furent tout étonnés de se trouver seuls, ensemble, libres de se parler à cœur ouvert. Cette liberté les gêna, et ils ne purent d’abord prononcer un seul mot. Jean surtout, plus gauche en amour qu’en toute chose, restait silencieux et presque froid, ne sachant comment entamer la conversation, et désirant pourtant dire à Jeanne tout le bonheur qu’il éprouvait. De son côté, Jeanne pensait avec raison qu’elle n’avait déjà été que trop claire dans ses démonstrations d’amour ; elle jugeait que son choix valait bien un remercîment, et elle attendait ce remercîment. Ils étaient donc tous deux fort embarrassés d’eux-mêmes.

Avec cet art merveilleux qu’ont les femmes pour trancher les situations difficiles, Jeanne trouva un moyen d’engager la conversation.

— J’ai peur, cria-t-elle tout à coup.

— Peur de quoi ? demanda l’hercule.