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LA REQUÊTE AUX ETOILES

Jusqu’à mourir, soûlés de couleurs et d’odeurs.
Vous êtes des essaims d’abeilles travailleuses,
Et vous allez posant vos baisers maraudeurs

Sur la bouche des lis, des roses, des veilleuses.
Mais où donc portez-vous le miel de vos butins ?
Où donc les cachez-vous, vos ruches merveilleuses ?

Si ce miel savouré doit changer nos destins,
Pourquoi n’en pas verser dans nos cœurs une larme
Avant de vous sauver ainsi tous les matins ?

Vous êtes des fanaux et des signaux d’alarme,
Sous les flots de la nuit montrant partout l’écueil ;
Et moi qui pour boussole unique et pour seule arme

Dans ma nef de hasard n’ai rien que mon orgueil,
Lâche, je reste en panne, et flottant sur son ancre
Mon ponton sans voilure a l’air d’un grand cercueil.

El la moule s’incruste à ma quille, et le cancre,
Le poulpe, toute la vermine des rochers,
Dans un bouillonnement de vase couleur d’encre