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LES BLASPHÈMES

IV

LA NUIT


J’ai rêvé que la Nuit n’était que la putain
D’un vieux soudard paillard qui la paye en butin.
Ce sergent aviné d’une bande en guenilles
A tué des vieillards, des enfants et des filles,
A brûlé des maisons, a mutilé des morts,
S’est vautré dans un tas de crimes sans remords,
Et le feu l’a fait noir, et le sang l’a fait rouge,
Et c’était pour gagner de quoi payer sa gouge.
Il vient lui dégrafer sa robe de velours,
Et sur cet écrin noir qui s’étage en plis lourds
Il jette par poignée, au hasard, pêle-mêle,
De l’or, des diamants, des perles. La femelle
Lui fait risette, et pour chacun de ses cadeaux
Lui rend un long baiser dont frissonne son dos.
Elle montre à son tour ses trésors de chairs blanches,
Son ventre ferme et lisse entre ses larges hanches,