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PROLOGUE

Au souflle de ce spleen imnonde
Se pourrissent empoisonnés ;
Même avant la première goutte
Tout breuvage offert nous dégoûte.
Nous dont l’oreille absurde écoute
L’ancien rêve en le regrettant ;
Toutes voluptés sont amères
A nous qui cherchons ces chimères :
L’absolu dans les éphémères
Et l’éternité dans l’instant.

Donc, ô mes frères, pauvres hommes,
En vérité je vous le dis,
La fin de siècle que nous sommes
N’est pas encor le paradis.
Les religions disparues
Ne font plus de jeunes recrues ;
On ne voit plus d’âmes férues
Pour les croyances d’autrefois ;
D’autre part, nul ne se révèle
Qui plante dans notre cervelle
La fleur de quelque Foi nouvelle
Sur le fumier des vieilles Fois.

Peut-être il valait mieux encore
Vivre dans ces temps bienheureux