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les blasphèmes


C’est moi qui vibre dans toute âme révoltée,
Dans tout âpre génie où vous voyez un fou.
C’est moi le noir Caïn, et c’est moi Prométhée
Le sublime filou.

C’est moi Lucrèce, et c’est moi Job, et Galilée,
Kepler, Newton, Fulton, Volta, tous les savants,
Et Gutenberg par qui votre pensée ailée
S’envole aux quatre vents.

Grâce à moi vous avez dominé la matière,
Subjugé ses secrets les plus mystérieux,
Et vous êtes les rois de la nature entière ;
Non pas les rois ; les dieux !

Vous avez éventré les montagnes énormes,
Franchi les mers, bâti des cités. Exigeants,
Obéis, vous donnez à la terre les formes
De vos rêves changeants.

Vous avez maintenant fait de chaque mystère
Votre esclave. Tout cède à votre volonté,
Même la foudre : vous avez pour secrétaire
Le tonnerre dompté.