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LE JUIF-ERRANT

J’ai VU tes papes féroces,
Ayant ta croix pour drapeau.
Massacrer à coups de crosses
Les brebis de ton troupeau.
J’ai vu, comme un grain qu’on foule,
Sous leurs pieds d’où le sang coule
Pleurer et crever la foule
De ceux pour qui tu prêchas.
Dans ta Rome tant vantée
J’ai vu ta face insultée
Par plus d’un pontife athée
Qui Ja couvrait de crachats.

J’ai vu, fiers, impitoyables,
Les forts toujours triomphants
Écraser les pauvres diables
Et les petits, tes enfants,.
J’ai vu les gueux, le vulgaire,
Pour qui tu mourus naguère,
Fauchés sans fin par la guerre
En ton nom, ô Dieu de paix !
Dans leur existence brève
J’ai vu qu’ils souffraient sans trêve
Et qu’ils souffraient pour ton rêve,
Et qu’ainsi tu les trompais.