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nous autres gueux


J’ai fait, quand j’avais quinze ans,
Des rêves éblouissants
     Qui parlaient de gloire.
Dans ma tête j’avais mis
Que j’étais grand ; mes amis
     Me disaient d’y croire.
Aujourd’hui j’écris ces vers.
Ils vont droit ou de travers :
     Lequel ? peu m’importe.
Ça m’amuse qu’ils soient lus ;
Mais à qui me promet plus
     Je ferme ma porte.

Faut-il en pleurer ? C’est sot.
Que je sois ou non poète,
De Platon je tiens un mot
Qu’avec Platon je répète :
Bast ! zut ! ὅ τι ἂν τυχῶ !
À l’hasard de la fourchette !
Bast ! zut ! ὅ τι ἂν τυχῶ !
J’ vas fourrer mes doigts dans l’ pot.

J’ai passé plusieurs hivers
À lire en jargons divers
     Plus d’un philosophe.
Ils sont de noir habillés,
Et leurs esprits sont taillés
     Dans la même étoffe.