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la chanson des gueux

V

FRÈRE, IL FAUT VIVRE


à maurice bouchor


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Oui, je pleurais hier et j’en voulais mourir.
Frère, étais-je assez bête ! Ah ! j’aime mieux être ivre !
Et tout de suite ! mieux vaut tenir que courir.
Verse-moi du vieux vin, beaucoup. Frère, il faut vivre !

Verse ! J’ai le gosier meurtri par les sanglots,
J’ai la luette sèche et j’ai la langue rêche.
Verse ! verse du vin ! Encore ! Et que ses flots
Au ruisseau de mon cou chantent leur chanson fraîche !

Et fais-nous apporter des viandes, du jambon
Rose comme une joue en fleur de miss anglaise,
Et du roastbeef saignant. Frère, le sang est bon.
Et déboutonnons nos gilets tout à notre aise !