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gueux de paris

Que je ne possédais souvent pas une guigne,
Et qu’en quittant pour moi la soupe de la ligne
      Tu trouvais pis et non mieux.

Mais qu’importe ! C’était mon cœur et non ma bourse
Que tu cherchais, non pas la soupe, mais la source
      Où se rafraîchit l’amitié,
Les longs épanchements qu’on veut toujours entendre,
Souvenirs, vœux, regrets, consolation tendre…
      On souffre, on jouit de moitié.

— Moi, je fais un gros drame, et j’en suis tout en nage,
Mon cher toutou, car mon principal personnage
      Ne se dessine pas très bien.
— Moi, je suis plus joyeux qu’un poète lyrique !
J’ai découvert un trou derrière une barrique,
      Juste de quoi loger un chien.

Et les amours ? — Mon bon caniche, je suis triste.
Car la femme, vois-tu, n’aime pas bien l’artiste.
      Trop plein de désirs superflus.
— À qui le dis-tu, va ? La femelle nous triche.
Si le poète souffre, hélas ! pour le caniche
      Tout n’est pas de rose non plus.

Ainsi, tiens, j’adorais une jeune épagneule,
Mais comme un fou, tu sais. J’en perdais nez et gueule ;
      J’aurais mis pour elle un collier ;