Page:Richepin - La Chanson des gueux, 1881.djvu/165

Cette page a été validée par deux contributeurs.
128
la chanson des gueux


XIII

À MON AMI SANS-NOM


caniche errant sans profession


Je t’ai beaucoup aimé, grand voyou de caniche,
Et j’offris bien souvent la pâtée et la niche
      À ton existence sans but.
Mais, par le rire obscur de ta prunelle bleue,
Par le geste éloquent et voulu de ta queue,
      Toujours tu me répondais zut !

Pourtant tu m’aimais bien aussi, toi, je l’avoue.
Par le soleil, ou par la pluie, ou par la boue,
      Quand tu voyais l’ami Chepin,
Pour venir avec lui causer de balivernes,
Tu quittais même la grand’porte des casernes
      Où fumait la soupe de pain.

Et cela n’était pas, quoique Bouchor en dise,
Un calcul d’intérêt fait par ta gourmandise :
      Car tu savais bien, pauvre vieux,