Page:Richepin - La Chanson des gueux, 1881.djvu/162

Cette page a été validée par deux contributeurs.
125
gueux de paris

Un cri s’enfle et brusquement crève,
Comme un flot, hurlant vers la grève,
    S’y vient assoupir.

Lentement la voix recommence,
Et dit d’une ancienne romance
Le long refrain chargé d’ennuis.
Obscure, tremblotante et douce,
C’est comme une poule qui glousse
    Dans le fond d’un puits.

On se sent venir une larme.
Mais le mélancolique charme,
Douloureux et sentimental,
À l’angle d’un couplet cocasse
Violemment accroche et casse
    Sa voix de cristal.

Et la voix saute, saute, saute,
Toujours plus rapide et plus haute,
Par cris durs, pointus et stridents,
Qui vous font à leur chant farouche
Fermer les yeux, ouvrir la bouche,
    Et grincer des dents.

Oh ! quelle diabolique verve !
Plus vite ! plus haut ! On s’énerve,
On souffre, on bâille. Tout à coup