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la chanson des gueux

IV

VARIATIONS DE PRINTEMPS SUR L’ORGUE DE BARBARIE


Bonne consolatrice, ô fée, ô Mélodie,
Soupir mélancolique aux sonores langueurs,
Comme au lit des mourants l’homme qui psalmodie
Toi qui verses le baume et la paix à nos cœurs,

Tu sais tout embrasser dans tes formes si vagues
Et merveilleusement revêtir de tes sons,
À la fois ondoyants et forts comme les vagues,
Nos secrets les plus chers que seuls nous connaissons.

Dans l’air qu’il composa, triste ou gai, rude ou tendre,
Qui sait ce que pour nous met le musicien ?
Mais dans l’enivrement que j’éprouve à l’entendre
Qui sait ce que je mets ? Lui-même il n’en sait rien.

Il a chanté l’amour peut-être sans maîtresse,
Parlé de désespoirs sans en avoir aucun.
Qu’importe ? Si sa voix exprime ma détresse,
Sans le savoir, sa voix a chanté pour quelqu’un.