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du Chev. Grandisson

flatter que par le crédit de mes Sœurs, il ne me seroit pas impossible de faire agréer mes sentimens à une jeune Personne, dont les affections ne me paroissoient point engagées : mais je ne me suis jamais permis de m’arrêter long-temps aux espérances de cette nature. Chaque regard de complaisance, chaque sourire que je voyois rayonner sur cet aimable visage, je l’attribuois à la bonté naturelle, à la franchise, à la reconnoissance d’un cœur généreux, qui attachoit trop de prix à un service commun, que j’avois eu le bonheur de lui rendre. Quand j’aurois été plus libre, je me serois bien gardé de me priver d’un spectacle si doux, par une déclaration trop précipitée. Je savois, par l’expérience de plusieurs autres Hommes, que si la douceur naturelle & la politesse de Miss Byron engageoient tous les cœurs, le sien n’en étoit pas plus facile à vaincre.

Cependant, malgré tous mes efforts pour interrompre une concurrence de sentimens qui s’étoit formée si vîte, j’éprouvois encore que mon embarras croîssoit avec ma nouvelle passion. De mille moyens que j’avois tentés pour ma défense, je vis alors qu’il ne m’en restoit qu’un seul, c’étoit de fortifier mon cœur dans la cause de Clémentine, par l’assistance de Miss Byron même ; en un mot, d’informer Miss Byron de ma situation, d’intéresser sa générosité en faveur de Clémentine, & de me priver ainsi de l’encouragement dont j’aurois pu me flatter, si j’avois